Un Lapsang Souchong à FUERTEVENTURA


L’air est particulièrement pur à Fuerteventura – île canarienne à quelques dizaines de miles seulement du Sahara occidental – sauf les jours de calima, quand le vent d’est souffle des morceaux de désert par-delà l’océan et voile l’horizon d’un fin rideau de sable. 

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 Sables de Fuerteventura - ©levaporettoblogue.blogspot.com
Ce matin-là le calima s’était calmé, l’air était transparent. De la grande terrasse de la maison aux allures d’hacienda mexicaine posée sur le champ de roche volcanique noire, je voyais au loin le village de La Oliva, ses petites maisons blanches et cubiques. Juste devant moi un jardin de cactus et d’euphorbes et, derrière, la colline ocre d’un cratère. 

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Cratère et champ de lave (La Oliva, Fuerteventura) - ©levaporettoblogue.blogspot.com
C’est le petit matin – il fait presque froid, nous sommes en janvier. Les feuilles du Lapsang souchong que j’ai jetées dans ma théière de fonte sont mates et noires, telles du charbon de bois. Y a-t-il jamais eu une forêt sur cette terre aride de Fuerteventura ? Était-elle jadis recouverte comme La Palma, de hauts conifères au bois imputrescible ?  Que raconte ce paysage tellurique ?

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Plaines volcaniques (Fuerteventura) - ©levaporettoblogue.blogspot.com
La roche du volcan craque sous ma chaussure. Je me suis aventurée, ma tasse de thé à la main, sur le petit chemin qui serpente derrière la maison. Un petit lézard kaki me coupe la route et va vite se nicher entre deux pierres. Un minuscule écureuil cendré court léger sur les cailloux. Le ciel est étale. La liqueur dans ma tasse de terre cuite est limpide, couleur d’ambre foncérésine fossile. S’en dégage une vapeur chargée de parfums fumés et de sous-bois résineux.

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Lave et pétrole (La Oliva, Fuerteventura)- ©levaporettoblogue.blogspot.com
Je lève les yeux vers le cratère. Il n’y a là aucune trace humaine. J’imagine les débuts de l’île, il y a vingt millions d’années. Un spectacle fantastique de roches incandescentes propulsées de l’intérieur de la Terre et retombant en cascades en fusion dans l’eau salée, formant des dragons de vapeur épaisse. Quelle odeur avaient ces parfums originels composés de sel, d’eau marine et de lave ?

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Corrosion (El Cotillo, Fuerteventura) - ©levaporettoblogue.blogspot.com
Debout, si petite devant le cratère, l’horizon ocre, noir et bleu, je bois mon thé. Surgit de la tasse une forêt primitive, brute, humide et pure, immédiatement ensevelie sous une pluie de lave brûlante. Ne reste plus que l’odeur fossile et pyrogénée des épicéas. La beauté des volutes originelles. 

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 Eau, bois et chaleur géothermique ©levaporettoblogue.blogspot.com