Un thé Bao Zhong à AKAROA - Péninsule de Banks, Ile du Sud, Nouvelle-Zélande, Océanie
Du
balcon de la maison de bois qui surplombe la baie d’Akaroa, je me laisse porter
par le mouvement silencieux des voiliers blancs qui tracent de fins sillons sur
les eaux lactées du Pacifique.
C’est
le matin, l’air est pur et bleu, si calme que les oiseaux emplissent l’espace
du bruit des battements de leurs ailes et de leurs étonnantes mélodies.
Eaux céladon de la baie d'Akaroa ©levaporettoblogue.blogspot.com |
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Le
contraste entre la végétation opulente et verdoyante de la colline – harmonieuse
palette de verts : émeraude, jade, menthe, sauge, mousse… piquée ici et là
de rose, de jaune ou de blanc – et le bleu céladon des eaux étales sous le
bleu clair et frais du ciel, dessine un patchwork naturel qui m’invite à
préparer avec délicatesse une tasse de thé Bao Zhong (thé taïwanais de la
famille des thés Oolongs, nommés aussi « bleu-vert »).
Bleu-vert d'Akaroa ©levaporettoblogue.blogspot.com |
Dans
le petit musée foisonnant de la voisine baie d’Okain,
j’ai pris en photo des sacs et des boîtes de thé, témoins de la forte
consommation de cette boisson en Nouvelle-Zélande depuis au moins 200 ans. Le
caractère de ces thés noirs, importés essentiellement des plantations des
colonies de l’empire britannique au Sri-Lanka (ex-Ceylan) et en Inde, était
certainement aux antipodes de mon subtil Bao Zhong : les Anglo-saxons de
Nouvelle-Zélande buvaient des thés noirs boisés et épicés, corsés, astringents,
à la liqueur acajou. Une boisson exotique et revigorante qui allait de pair
avec l’esprit pionnier, conquérant et britannique de ces immigrés venus
d’Europe, une boisson forte, à la fois rapeuse et veloutée, comme leur vie d’aventures.
Une boisson qui tranchait avec la douceur de la nature qui s’étend ce matin
devant moi dans la baie d’Akaroa ; tout comme les couleurs des paquets de
thé en papier épais ou la dureté du bois et du métal des boîtes tranchaient
avec la délicatesse des fleurs de la baie, ses eaux soyeuses et les chants
aériens de ses oiseaux.
Thés d'antan, musée de la baie d'Okain ©levaporettoblogue.blogspot.com |
Je
mets donc dans ma tasse une poignée de longues feuilles vert sombre de Bao Zhong,
je les arrose d’eau chaude et je regarde le liquide se colorer au fur et à
mesure que se diffuse dans l’eau le parfum du thé de Taïwan. Je mets de côté les feuilles infusées
et plonge mon nez dans la vapeur
qui s’en échappe : somptueuse odeur végétale, à la fois fraîche et lactée –
note vanillée – comme l’odeur des genêts des collines de la baie. Étonnante
harmonie aussi entre la couleur dorée de la liqueur de mon thé et le jaune d’or
des massifs de genêts ; entre la saveur miellée du thé et l’odeur de la
fleur, encore.
Genêts en fleur, péninsule de Banks ©levaporettoblogue.blogspot.com |
Mais il y a plus encore : fragrances d’herbes fraîches
et folles, bouquet floral mêlant rose, jacinthe et chèvrefeuille, pétillante
note poivrée ; onctuosité portée par une élégante astringence et une fine
amertume ; mélodies légères et ascendantes.
Un oiseau s’est posé devant moi. C’est un tui. Nous
nous regardons. Un rayon de soleil éclaire le camaïeu vert-bleu de ses ailes
irisées. Quand il s’envole j’aperçois un reflet doré. Au loin, la tranquillité
de l’eau. Mon thé et le monde ne font qu’un.
Le vol bleu du Tui
http://nzbirdsonline.org.nz/species/tui
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Article sur l'histoire du thé en Nouvelle-Zélande :
https://www.nzgeo.com/stories/time-for-tea/